Tarification solidaire en région Bretagne : Est-elle vraiment solidaire ?

Depuis la rentrée scolaire 2022-2023, la région Bretagne a mis en place dans tous les lycées publics de la région une tarification solidaire déclinée selon le quotient familial, pour leur service de restauration et d’hébergement.

Pour la rentrée 2024-2025, voici les grilles tarifaires.

Une démarche informatique à effectuer 

Chaque famille, ayant un ou des enfants scolarisés en lycée public ou EREA à la rentrée du mois de Septembre 2024, doit le ou les inscrire sur le site de la Région Bretagne « mon-compte.bzh » avant le 22 septembre 2024, pour pouvoir bénéficier du tarif solidaire pour l’année scolaire. Le délai est court à compter de la rentrée scolaire et n’a même pas été imaginé pour être en adéquation avec la date limite pour élaborer la demande de bourse lycée.

Pour toute inscription après cette date, le tarif le plus élevé est appliqué, soit 4,60 € pour le 1er trimestre. La tarification solidaire, dans ce cas, ne sera prise en considération qu’à compter de la facturation du 2ème trimestre.

La région Bretagne justifie la mise en place de la tarification solidaire :

  • Plus d’égalité entre tous les lycéens, avec une tarification identique dans tous les établissements
  • Plus d’égalité entre les familles, avec une tarification calculée selon les ressources du foyer.

La région Bretagne indique sur son site que les lycées proposent alors un repas équilibré et complet à partir de 2,70 €.

Quid des familles éloignées de l’outil informatique et de l’accès à internet ?

Les représentants de la Région Bretagne considèrent que toutes les familles ont la capacité d’effectuer la démarche informatique et ont accès à internet et un ordinateur.

Cependant, les familles les plus en difficultés, qui vivent pour beaucoup la fracture numérique, ne peuvent pas bénéficier de la tarification solidaire car elles sont mises en difficulté pour la solliciter (la tarification solidaire).

La mise en place de permanences physiques pour accompagner les familles les plus éloignées de l’informatique dans la démarche n’a pas été effective. Seul le site et un flyer indiquent des coordonnées informatiques et téléphoniques (du lundi au vendredi de 9 heures à 18 heures) pour répondre aux questions des usagers.

Une démarche complexe qui interroge

Le site d’inscription apparaît compliqué, même pour les plus aguerris de l’informatique. Il y a des allers-retours de page et parfois des familles se posent la question si elles ont bien effectué la démarche. D’ailleurs, celles qui n’ont pas bien fait sont sanctionnées et il leur est appliqué la tarification la plus élevée, soit 4,60 € le repas.

C’est un logiciel qui ne supporte pas les erreurs !

Le site de la région indique aux familles leur obligation de cocher une case qui lui donne l’autorisation de se mettre en contact avec la CAF et/ou les impôts pour récupérer leur quotient familial afin de bénéficier de la tarification solidaire. Bien sûr, il y a une case à cocher « refus d’autorisation », mais dans ce cas, la tarification la plus élevée est appliquée, soit 4,60 € le repas.

La région Bretagne ne donne alors aucune liberté aux familles de transmettre les documents relatifs au calcul du quotient familial.

D’ailleurs, pour encore complexifier la démarche, les familles doivent réactualiser l’inscription tous les ans.

Imaginez celles pour qui cela relève d’un grand périple !

Un fichage parmi d’autres

Les familles sont encore fichées sur un site informatique avec des données sensibles.

Qu’en est-il de l’autorisation CNIL ?

Comment sont stockées les informations et par qui ?

Une démarche qui n’est ni égale ni solidaire

Autre conséquence indirecte et inégalitaire : auparavant, dans plusieurs lycées bretons, les tarifs de demi-pension étaient moins élevés pour les familles.

En moyenne, il fallait compter 3,50€ le repas, alors que le tarif maximum aujourd’hui est de 4,60 €.

A cette rentrée, si l’on considère les familles qui ne font pas la démarche, ou commettent des erreurs, alors qu’elles peuvent prétendre à une tarification moindre de solidarité, cela veut dire autant de famille en difficulté.

Lorsque nous, assistantes de service social, nous en rendons compte, ce sont alors les bourses ou le fonds social lycéen qui sont sollicités pour pallier cette tarification mal calculée.

Une démarche qui engendre un surcroit de travail dans les lycées

Depuis la mise en place de la tarification solidaire, les personnels de gestion dans les établissements accusent un surcroît de travail. En effet, sans moyens supplémentaires, les personnels de service de gestion des établissements vérifient la tarification des élèves sur leur logiciel pour que la tarification solidaire soit appliquée au plus juste (auprès des familles), en fonction des (leur)situations familiales et financières. En effet, des familles commettent parfois des erreurs dans leurs informations, elles omettent de cocher une case ou ne vont pas jusqu’au bout de la démarche en pensant avoir validé, et la tarification la plus élevée s’applique, alors qu’elle ne le devrait pas.

C’est un travail dense qui entraîne une surcharge de travail administratif.

A chaque rentrée scolaire, l’assistante de Service Social en Faveur des Elèves qui intervient sur le lycée est interpellée par les familles qui sont en difficulté pour effectuer les démarches, car trop éloignées de l’informatique ou dans l’incapacité de le faire.

Cela reste de l’accès aux droits, mais cela engendre un surcroît de travail des assistantes de service social et dans un temps limité.

Une seule réponse pour répondre à la précarité

Actuellement, les étudiants bénéficient du repas à 1€. Pour les lycéens, le tarif du repas le moins élevé est de 2,70€.

Nous devons exiger le même tarif solidaire pour tous nos collégiens, lycéens et lycéennes !

Repas à un euro pour toutes et tous !

Nathalie Duvivier

SNUASFP-FSU de l’académie de Rennes